ENTERREMENT D’UNE VIE DE JEUNE FILLE de Gilles Granouillet

CRÉATION 2021-2022 

Années 1980. Jean, producteur musical prospère, écourte un safari photo en Afrique pour rejoindre à la hâte, avec sa nouvelle compagne, la maison familiale de Saint‑Jean-de‑Bazieux : sa petite sœur est décédée.

Tout comme lui, elle avait quitté la maison familiale pour tenter sa chance en ville dans le domaine de la musique. Mais avec moins de succès et sans pouvoir compter sur l’appui de son frère… qu’elle n’a peut-être même pas sollicité si l’on en croit les courriers qu’elle n’a pas envoyés.

Bien sûr, ce retour à la campagne après tant d’années, qui plus est autour d’un cercueil, ravive les tensions au sein de la fratrie. D’autant que, comme toujours, se cachent, sous la poussière du temps, quelques secrets qui biaisent les relations au sein des familles…

Texte édité chez Lansman

Jeu :
Morgane Arbez
Eric Borgen
Sandrine Bouvet
Cécile Chauvin
Francine Gaonach
Fabrice Michel
Laurent Viel

Texte : Gilles Granouillet
Mise en scène : Christophe Vincent
Scénographie : Alain Deroo et Christophe Vincent
Costumes : Nadia Genez
Construction : Alain Deroo
Création lumière et régie : Didier Marchal
Création sonore : Julien Woittequand
Création vidéo : Robin Perrey assisté de Jérémy Vigouroux
Régie générale, vidéo, son : Tony Galliano
Crédit Photos-Vidéos : Jean-Baptiste Benoît
Stagiaire technique : Lounès Salhi
Chargée de diffusion : Edna Fainaru
Texte publié chez Lansman

 

Le frère, au bord du gouffre – image réalisée au Théâtre Edwige Feuillère, Vesoul – Résidence de création de juin 2021

 

J’ai rencontré l’écriture de Gilles Granouillet en 2014 à travers une courte pièce intitulée La Gare, éditée dans le recueil « Les Monstres » de la Comédie Française. J’ai été séduit par l’accessibilité de son écriture, par la trajectoire inattendue de ses personnages. J’ai eu la sensation, dès la première lecture, qu’il s’agissait d’un théâtre pour tous. Quand Gilles m’a proposé son texte Enterrement d’une vie de jeune fille, j’ai immédiatement retrouvé ce même plaisir, avec en plus le rapport à l’intime, à mon intime.

Ce texte est un théâtre âpre et sensible qui fait entendre la complexité de nos chemins de vie.
Le deuil est l’occasion pour une famille de se retrouver, de se parler, de s’affronter parfois…La perte d’un être cher, au-delà de la peine, nous met dans un état particulier où le temps est suspendu, où l’introspection devient possible voire nécessaire. C’est ce moment où l’on regarde d’où on vient, où on est et où on va. C’est à cet endroit que nous trouvons les personnages de ce texte, qu’ils aient un passé commun ou pas, qu’ils soient enracinés ou déracinés, qu’ils soient aimés ou détestés.

Cette histoire est la photographie d’une époque, années 80, où les valeurs soixante-huitardes sont progressivement délaissées, au profit d’un nouvel Eldorado : la mondialisation. Où les territoires ruraux sont progressivement abandonnés pour les milieux urbains, où le lait de son voisin coûte plus cher que celui d’Espagne, où l’on commence à marcher à reculons, où ça va plus vite, beaucoup plus vite…

Le temps se joue de nous. Comme au théâtre, comme dans cette fable qui se déroule à priori sur une journée… Oui mais voilà, Jean, le frère, va bouleverser tout ça en cassant les codes du théâtre, notamment en nous prenant à parti, nous spectateurs. Il distendra également le temps avec notamment des « flash-back » et des « flashforwards».
C’est pourquoi j’ai choisi d’axer la scénographie et la mise en scène autour du prisme de Jean. Cette journée a déjà eu lieu, il y a longtemps. Ce à quoi nous assistons finalement n’est qu’un souvenir marquant de ce personnage, comme s’il s’agissait du dernier effort de sa pensée avant de tomber lui-même dans « la fosse de l’oubli ». D’où la forme évanescente voire onirique de notre scénographie en apparence réaliste. Un mur, ou une fenêtre, ou une porte de la ferme familiale seront rognés, gommés en partie comme la mémoire qui se floute, qui oublie avec le temps…

En avançant dans cette histoire, nous irons jusqu’à la perte totale d’espace, où les personnages seront comme flottants dans le vide, au bord du précipice, dans « la fosse de l’oubli ».

J’espère faire résonner ce texte dans ce qu’il a de plus intime, de plus enraciné dans sa réalité, aussi dure soit-elle, pour mieux nous transcender vers une dimension poétique… absolue.
Christophe Vincent – juin 2019